Il y a des moments, comme ça, où tout est réuni, des moments où l’on se dit, « enfin, j’y suis » ! Il y a des lieux qui te transportent. Il y des images qui s’accrochent à ta rétine pour ne plus jamais t’abandonner.  Il y a Batad et ses rizières …


Tout commence dans un Jeepney qui nous dépose tout au bout d’une piste défoncée. De là, un sentier s’enfonce dans la montagne. Il est 10h et la chaleur est déjà étouffante. Nous entamons alors une randonnée de 1h30. Le sentier n’est pas difficile mais la moiteur s’impose à nous. Nous n’avons que de tous petits sacs et pourtant nous nous faisons doubler régulièrement par des porteurs qui amènent les vivres au village, celui-ci ne possédant aucun accès routier. Leur attelage, posé à chaque extrémité d’un bâton, est constitué de bouteilles d’eau, de biscuits… je n’imagine même pas le poids que cela doit représenter… et tout cela en tongs, comme de bien entendu ! Nous atteignons quand même vaillamment le village au bout d’une heure.

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–  L’effet Wahou  –
Quand l’arrivée à Batad est juste grandiose

La montagne forme comme un fer à cheval, dont tous les flancs abrupts sont taillés de rizières en terrasse. Pas étonnant que ce site soit classé au Patrimoine Mondial de l’Humanité !

Rizières de Batad

Après avoir trouvé une hébergement rudimentaire (mais avec vue 😆 ) et nous être restauré en terrasse, nous engageons un villageois pour nous servir de guide. Et c’est parti pour 4h à travers les rizières, cheminant sur les parcelles, descendant (et montant !) des centaines de marches… heureusement le soleil se voile, nous épargnant ses rayons torrides. On joue les funambules le long des murets. On se voit déjà tomber dans une rizière  :mrgreen: . Nous croisons les travailleurs … enfin les travailleuses, car ce sont surtout les femmes qui bossent ici ! Notre paysan, d’une cinquantaine d’année nous explique les traditions du peuple Ifugao. 


La minorité ethique Ifugao s’est implantée
dans les montagnes de Luzon il y a plus de 2000 ans.
Le terme ifugao serait d’ailleurs dérivé
du mot ipugo qui signifie « de la montagne » .

batad

Il nous explique les anciennes guerres tribales, dont l’image-phare du monde ifugao, notablement bien entretenue, qui retient l’attention première des Occidentaux : les « chasseurs de têtes ». Avec les Kalinga, les Bontoc et d’autres, les Ifugao  » chassaient les têtes  » pour deux raisons majeures : la revanche (version locale de la loi du talion) et le prestige (individuel ou familial). Au début du siècle, il fallait impérativement « posséder » une tête pour être socialement accepté au sein de la communauté. Mais promis, aujourd’hui, personne ne viendra vous raccourcir ?.

Rizières de Batad

Il nous rappelle aussi le danger qui menace les rizières en raison de l’exode rural, mais la population semble comprendre le défi qui se joue ici. Le tourisme qui se développe ne pourra exister sans le maintien du travail de réparation et de plantation des rizières.

Pour l’Unesco,  » les rizières en terrasses d’Ifugao incarnent le mélange absolu de l’environnement physique, socioculturel, économique, religieux et politique. Il s’agit, qui plus est, d’un paysage culturel vivant d’une beauté incomparable. Les rizières en terrasses d’Ifugao sont une contribution inestimable d’ancêtres philippins à l’humanité. Construites il y a 2000 ans et transmises de génération en génération, les rizières en terrasses d’Ifugao représentent une illustration immuable d’une civilisation ancienne qui a résisté aux nombreux défis et revers causés par la modernisation « 

Rizières de Batad

Nous demandons à notre guide quel est son travail. Il travaille à l’entretien des rizières. « Les siennes »? Non, celles de son frère. Notre guide nous explique que seul l’aîné de la famille hérite de la terre. « C’est pas un peu injuste, ça ? », pensons-nous en bons occidentaux que nous sommes. Mais ainsi, les rizières ne sont pas découpées et éparpillées au fil des générations. Et l’aîné se doit par contre d’engager les autres membres de la famille pour travailler dans ses terres, conservant du travail et de la richesse pour toute la famille. De quoi maintenir la terre familiale.

Nous revenons de la visite bien fatigués et les jambes un peu flageolantes. C’est qu’elles avaient la pression pour nous éviter de tomber dans la boue des rizières, monter est descendre tant de marches ! C’est avec enthousiasme que nous acceptons les services d’une vieille dame qui propose des massages, au tarif imbattable de 250 Php. Hum, un vrai régal, juste avant la nuit 🙂 .

Le réveil est doux à Batad. Le silence, quoiqu’entrecoupé de chants de coqs et d’aboiements de chiens, est reposant. On ouvre la fenêtre et toujours le paysage éclate devant nos yeux ! Non, cet amphithéâtre de rizières n’était pas un rêve 😆

Rizières de Batad

Après une bonne douche froide 😯 , il nous faut quitter ce lieu. Nous sommes ravis d’y avoir passé une nuit. Avec un peu plus de temps, une journée entière sur place, nous aurions pu également visiter un village voisin, ou descendre à la cascade de Tappiyah.

Nous entamons la remontée du village jusqu’au col où nous attend notre Jeepney … Il fait toujours aussi lourd, et cette fois, ce n’est que de la montée (ne pas y penser, un pas devant l’autre).

Au bout d’une heure, qui passe finalement assez vite, nous atteignons de nouveau le col. Et à midi, nous sommes de retour à Banaue, où nous profitons tranquillement de l’après-midi pour fureter dans les magasins à la recherche d’un souvenir artisanal. Entre 50 statuettes affreuses et de beaux tissus typiques, nous trouvons notre bonheur : un récipient à chaux pour le betel taillé dans un os de buffle d’eau (alors si ça ça n’est pas typique !) et un couteau fabriqué à Batad même pour se la jouer « coupeurs de tête » 😀 !!

Rizières de Batad

// Infos pratiques //


> Rejoindre Batad depuis Banaue :


Jeepney
: nous avons négocié à 250 Php un trajet privé proposait au départ à 850 Php. Pour cela, nous avons dû faire le tour des auberges pour trouver des touristes en partance pour Batad et prêts à partager le Jeepney. Sinon, vous pouvez prendre les Jeepney publics, encore moins chers, qui partent plus tôt, voire même des tricycles.

aquarelle-philippines-jeepney
Jeepney, Philippines

Route pour le départ du sentier : Edit de 2016. Une route bétonnée descend désormais du Saddle, mettant Batad à 20 minutes à pied de la route.
45 minutes de trajet chaotique sur une route défoncée pour arriver au « Saddle » , mais on voit que le chauffeur est parfaitement habitué.

Stationnement à Banaue : Nous avons garé notre voiture sur la place des Jeepney de Banaue. Nous prevenons quelques chauffeurs qui ne semblent pas gênés. Nous décidons également de prévenir le poste de police juste en face, pour qu’ils ne trouvent pas ça bizarre et peut-être qu’ils y jettent un oeil. Ils sont enthousisates, on se sent rassurés de laisser la notre bon véhicule de location.

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> Hébergement à Batad

Ramon’s Homestay (400 Php ) : Hébergement très rustique avec des cloisons en bois. L’ambiance « auberge » y est très sympathique, proposant également le repas. Et puis on se sent tellement privilégié de dormir à Batad…

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Parure Ifugao, Philippines

> meilleure période pour visiter Batad

A Batad, il y a deux récoltes par an. Les rizières sont plantées en février et en août. Les récoltes ont lieu en juin et décembre. Les meilleures périodes sont donc Avril-Mai et Octobre-Novembre

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> Pratique

Il n’y a pas de réseau, pas de banque, pas d’internet à Batad. Prévoyez votre argent à l’avance (Banaue), consultez internet et vos infos avant de vous rendre à Batad

De nombreux objets artisanaux sont proposés à Batad, vous pouvez les retrouver également, avec plus de choix à Banaue.

#Cet article fait partie d’un ensemble de récits consacrés à notre voyage aux Philippines en Janvier 2013

> Carnet de voyage : itinéraire et budget ( à venir)
> Galerie photo ( à venir)
Carnet de croquis

> voir les articles dédiés :

14 Comments

  1. Coup de coeur pour… tes croquis ! tout de suite ils accrochent mon regard, je les adore vraiment !
    ces paysages de rizières sont magnifiques. Tu as vraiment su me donner envie.

    • Les 3 M dit :

      Merci à toi, ma grande fan de croquis ! J’ai justement pensé à toi en ajoutant les aquarelles dans l’article ??

  2. Lauriane dit :

    C’est magnifique !
    Quand vous dîtes au début de siècle, c’est pas le 21ème siècle hein ? ? J’imagine bien votre petite chambre perchée dans une maison au bord d’une rivière <3 La vue c'est tout ce qui compte, même avec eau froide ! Vous deviez avoir si chaud qu'elle en était salvatrice cette douche non ?

    • Les 3 M dit :

      Oui, la vue était extraordinaire, par contre, c’est la montagne et quand le soleil est couché, il fait frais. Du coup, la douche froide au matin, bof ??

  3. Céline dit :

    Comme toi, je pense que ces rizières s’accrocheraient à ma rétine également. En voir, est une sorte de vieux rêve que je ne saurais expliquer d’ailleurs. En attendant, je satisfais virtuellement cette envie, grâce à des témoignages comme le tien. Alors un grand merci 😉

    • Les 3 M dit :

      Ah merci beaucoup, tu nous fais très plaisir.? Effectivement, on rêve parfois intensément de paysages sans savoir pourquoi. Tout ce que je peu te dire, c’est que les rizières ne déçoivent jamais ?

  4. Eloïse dit :

    C’est superbe ! Ça y est maintenant je veux aller aux Philippines… Mais dois-je lire ton article sur El Nido ou c’est se faire du mal pour rien ?!? 😀 J’adore toujours autant tes croquis, je le redis tu es douée. Je garde sous le coude pour quand nous irons… 😉

    • Les 3 M dit :

      Merci, c’est très gentil, je vous souhaite de découvrir Batad, et cette région, totalement différente du reste du pays. Et finalement, tu n’as pas résisté à la tentation d-El Nido ?

  5. Mais que ces croquis sont beaux !! la couleur et la légèreté, un vrai bonheur au milieu de toutes ces superbes photos. Tu m’épates ! Je ne reviendrai pas sur le sujet douloureux des Philippines… je me venge avec la Chine du coup 😀

  6. Le Kaouchou dit :

    J’aime beaucoup les croquis également. On est dans le carnet de voyage style Hugo Pratt, et sans me moquer 😉
    C’est assez surréaliste pour moi ces paysages. Je me demande si la vie y est agréable.

    • Les 3 M dit :

      Merci beaucoup pour ton commentaire sur les croquis, ta référence me fait très plaisir (à mon petit niveau?).
      Concernant le mode de vie, je crois que je n’échangerais tout de même pas ma vie contre la leur. J’ai vu tellement de vieilles femmes avec le dos courbé d’avoir travaillé toute leur vie à planter du riz. Mais le résultat du point de vue du touriste est juste splendide !

      Marieke

  7. Antoine dit :

    Elles sont tops vos photos des Philippines. Ça fait rêver!
    Voilà un autre site où trouver des bonnes photos des Philippines. C’est un peu plus dédié à la rue et aux gens qu’aux paysages mais ça vaut le coup aussi. https://www.instagram.com/myshutterbag/

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